Théophile Gauthier
Les écrivains ont ce talent de donner un caractère unique et éternel à un lieu dont ils sont tombés amoureux. Vivre à Nijni Novgorod est un tournant dans mon existence car je réalise mon rêve de Russie et je lui en suis infiniment reconnaissante. C’est une histoire d’amour qui est restée longtemps enfouie et qui a trouvé un heureux dénouement. De plus, j’ai mis dans ma valise mon mari qui a découvert que son destin ressemblait à celui des femmes de Décembristes* ! Il a beaucoup d’humour et est tombé amoureux lui aussi de Nijni.
Tous les amis, la famille, les artistes et invités reçus à Nijni sont emballés par la beauté de la ville qui est située sur la ligne du Transsibérien à 400km à l’Est de Moscou. Je souhaite vous la faire découvrir et vous donner envie de vous y rendre car elle constitue une étape importante pour s’immerger dans la culture russe et possède à elle toute seule un caractère unique de par son architecture du 19e, 20e et 21e siècle. Son histoire est riche et singulière. Prévoyez au minimum 3 jours complets afin d’en profiter pleinement.
Pour moi, la meilleure façon de découvrir une ville est d’utiliser ses jambes et ses yeux. Oubliez donc la voiture sauf pour rentrer à l’hôtel quand vous serez vannés. J’ai toujours été curieuse et Nijni est un magnifique terrain de jeu. La ville est offerte aux fleuves Volga et Oka, à la taïga, à l’espace et à un ciel immenses, au soleil, à la pluie, aux vents, à la neige, elle souffle le chaud et le froid, le climat est capricieux, changeant et jamais ne nous endort. Elle accueille des couchers de soleil somptueux et flamboyants à couper le souffle.
Mes contradictions avec la marche à pied : prendre le métro, admirer les stations, sentir l’ambiance, observer les Russes dans les transports en commun : il roule très vite et fait un boucan incroyable ! Le moment préféré : passer sur le pont Kanavinski et apercevoir la ville et le paysage qui défilent.
Une liste et un inventaire à la Prévert** :
A Nijni, on se sent proche de la nature, il suffit de se tenir sur les Quais supérieurs de la Volga pour embrasser l’immensité de la Russie et prendre une grande bouffée d’air pur. On refait la même chose mais sur les Quais inférieurs pour puiser l’énergie de la Volga et on pense aux mythiques bateliers.
La Ville donne de l’énergie, Nijni est verte ou blanche suivant les saisons comme l’église du Kremlin et en automne elle est multicolore !
Bolshaia Pokrovskaia, artère piétonne principale et cœur battant de Nijni qui vous mènera du Parc Gorki à la Place Minine, vous admirerez les façades somptueuses et colorées, témoins d’un passé fastueux. Votre regard se portera vers les passants nombreux, les vendeuses de fleurs et de baies, les chanteurs de toutes les générations qui animent la rue hiver comme été, les jeux pour enfants, les poneys costumés pour les promenades. La BP est comme une métaphore de la vie, du temps qui passe et où rien ne change, la foule qui déambule, ambiance légère, festive, comme un dimanche éternel avec ses gardiens fidèles que sont les nombreuses statues espiègles qui attendent de converser avec vous.
Vous y trouverez de nombreux magasins de souvenirs : les fameuses matriochkas, la kokhlama, tout ce qui construit votre imaginaire russe car Nijni Novgorod est la Région qui les fabrique, le berceau de cet artisanat. En hiver, vous pourrez patiner en musique et en plein air au Stade Dynamo (location de patins) !
Les maisons en bois russes traditionnelles sont encore légion dans le centre ville même si certaines s’affaissent, flânez et observez leurs détails, leurs couleurs vives et le tour des fenêtres véritable travail d’orfèvre.
Prendre le hop on hop off bus et jouer aux touristes, moment de pur divertissement au 1er étage où on change son regard sur les quartiers.
Escalier de Tchkalov : vue exceptionnelle, monter et descendre, emprunter les sentiers du Parc Alexandrovski et retrouvez le bateau Héros Kater Geroï prêt à voguer sur la Volga, contemplez aux beaux jours le trafic fluvial et l’hiver les pêcheurs posés sur la glace surnommés les pingouins. Ils savent où se poser en fonction de la couche de glace et il faut voir leur vilebrequin, très impressionnant ! En bord de Volga, vous apercevrez le fier Cerf métallique, hiératique et symbole de la Ville et de la Région.
Le téléphérique : must absolu, en toutes saison, vue imprenable sur le fleuve Volga et la façon dont il se répand entre flux et zones marécageuses, totalement féérique et cours de géographie bluffant !
Le tour en bateau à moteur ou à voile : must en été pour observer les reliefs, rues et ponts que vous aurez parcourus.
Rojdestvenskaia : Rue presque piétonne remplie de bars et restaurants, très vivante, façades magnifiques et son Eglise Stroganoff, son joyau. De là vous pouvez remonter à pied vers Federovskaia en empruntant les nombreux sentiers de promenade.
Stade Vodnik : un curiosité, un lieu mythique un peu comme une ruine d’un stade grec antique mais d’un autre siècle, entretenu par quelques personnes, aimé, soutenu et fréquenté ! Il est plein de monde qui fait du roller, de la gym, du foot, de la course à pied ou de la bronzette et l’hiver du ski de fond.
Les églises, les monastères, les clochers, les coupoles : chapitre à lui tout seul, dense et inépuisable. Le passé et le présent conjugués. Les icônes, la peinture, l’art religieux, l’architecture, l’esthétique, les habits des ecclésiastes, la langue et les chants, les rituels, tout ceci est fascinant ainsi que la dévotion des Russes, les signes à l’entrée et au départ. C’est un univers à lui tout seul enraciné dans l’histoire et la culture russes qui se présente à vous où que vous regardiez, vos oreilles seront charmées par les carillons ; les cloches sont aussi des objets de curiosité. Petchorski Monastir / stroganof/Nevski et toutes les églises de la ville, chacune a son charme unique.
Des hauts et des bas : à Nijni, comme dans la langue russe, les montagnes russes sont américaines ! Je prends grand plaisir à faire des montées et des descentes dans les sentiers touffus des fossés et à emprunter des escaliers scabreux, à sentir la jungle plus forte que le béton, à faire l’école buissonnière dans les chemins où je croise peu de gens. Tous les chemins mènent au fleuve à Nijni ! Les sentiers du haut qui serpentent parmi les fossés, amènent à des impasses, sont jalonnés par ces jolis ponts piétons qui enjambent les crevasses et je croise parfois Monsieur Jules Verne toujours prêt à nous embarquer dans une folle aventure dont il a le secret. Il m’a confié qu’il se plaisait beaucoup ici car les jeunes mariés venaient lui confier leurs rêves. Bel endroit pour faire des photos.
Un très beau sentier à emprunter si vous avez le temps est celui qui longe l’Oka depuis l’ancienne Gare de Kazan, Romodanovski Vokzal, où vous pourrez admirer du street art – Nijni en regorge – sur les piliers de Metromost, vous pénètrerez dans la forêt qui est en contrebas du Parc Suisse (Schweitsaria), beau départ pour une randonnée pédestre loin du tumulte urbain.
Chelokovski Khoutor : le poumon dans la ville, des promenades, des baignades, la plage aux beaux jours et l’hiver du ski de fond, le musée ethnographique, voyage dans la Russie éternelle, beauté de l’art traditionnel et des gestes d’antan.
Se perdre dans des quartiers éloignés, déposés par un taxi. Tout est intéressant, le mélange des constructions, de lacs laissés à l’abandon où ville et nature semblent étonnées de se côtoyer.
Grande fascination pour les immenses tuyaux de chauffage à ciel ouvert !
Les musées à voir :
Le Kremlin : must pour l’histoire russe, époques médiévale, soviétique et contemporaine. De plus, le Kremlin abrite la Philarmonie où vous irez écouter un concert inoubliable, le Musée des Beaux-arts riche d’icônes, impressionnisme russe et son voisin le Musée Pouchkine-Arsenal, temple de l’art contemporain dans une approche très ouverte et accessible à un large public. Visiter le chemin de garde qui jalonne le mur d’enceinte, de là-haut vue imprenable sur la ville et le confluent.
Ousadba Roukavychnikovikh : visite obligatoire pour découvrir le faste du 19e siècle, la restauration a été très bien réalisée.
Musée avtozavod : collection de voitures fabriquées à Nijni avec des modèles extravagants et jamais vus.
Musée de la photographie : belles expositions, en plein centre ville. Vous pourrez vous faire photographier, tout le monde est satisfait car le résultat vous rend toujours beaux !
Les bars, cafés, pâtisseries et restaurants : on mange quand on veut, la nourriture est délicieuse, variée et vous avez possibilité de choisir de très bons vins et… de prendre quelques kilos.
Ariel : fabrique de boules de Noël unique car conçues et fabriquées sur place, à rapporter dans votre valise, vous n’aurez que l’embarras du choix et en plus des boîtes les protégeront pendant votre voyage !
Défi pour les amis nijninovgorodiens : m’emmener dans un quartier que je ne connais pas, ils ont toujours perdu… mais rien n’est perdu !
* voir l’histoire des Décembristes
**inventaire qui n’a apparemment ni queue ni tête d’après le poème Inventaire de Jacques Prévert